SAPHIR - La lanterne dragon - « L'Écaille de Lumière »

L'odeur de la terre cuite encore chaude. Le reflet doré qui danse sur les écailles d'un bleu intense. Mes doigts caressent sa surface rugueuse, sentent chaque relief que j'ai sculpté. Cette lanterne murmure des histoires de créatures mystiques et de flammes apaisantes.

Ce matin de juin, j'ai ouvert mes mains sur l'argile blanche. Elle était fraîche, presque froide contre mes paumes. J'entendais le bruit sourd de la croûteuse qui écrasait la terre en plaques de 6 millimètres. L'atelier sentait l'humidité douce de l'argile fraîche.

Mes doigts ont tracé les premières écailles. Une par une. Le trépan creusait des cercles parfaits dans la matière tendre, laissant échapper de petits copeaux d'argile. Chaque perforation résonnait comme un souffle discret. Je sentais la terre céder sous la pression, se transformer sous mes gestes répétés. Deux heures de façonnage minutieux, mes mains dansant avec les outils.

L'assemblage s'est fait dans le silence de l'atelier. Le couteau de potier glissait sur les bords, unissant chaque fragment. La forme du dragon prenait vie sous mes doigts, mystérieuse et puissante.

Puis est venue la patience. Trois jours sous plastique, l'argile murmurant son évolution. Dix jours à l'air libre de juin, la chaleur estivale caressant doucement sa surface. Je passais mes mains sur sa peau qui durcissait, écoutant les craquements discrets du séchage.

L'engobe rose ancien s'est étalé comme une caresse sur sa consistance cuir. Mes pinceaux glissaient, déposant cette teinte poudrée qui viendrait sublimer l'émail final.

Premier passage dans les flammes à 1050 degrés. L'odeur de la terre qui se transforme, cette alchimie que j'adore. Cinquante-huit heures de patience avant de pouvoir la toucher à nouveau.

Enfin, l'émail Lapis Lagoon. Cette couleur d'océan profond qui coulait sous mes pinceaux. Le trempage final pour unifier l'ensemble. Puis le second feu à 1000 degrés, cette fois pour révéler l'éclat brillant qui capturerait la lumière des bougies.

Quand je l'ai prise en main après ces vingt-et-un jours, j'ai senti sa solidité rassurante, ses 478 grammes parfaitement équilibrés. Sa surface rugueuse contrastait avec la douceur de l'émail, créant cette sensation unique sous mes doigts.